Les clubs de rugby professionnels sont des acteurs majeurs du développement du Grand Paris et servent au quotidien son attractivité internationale. Certes moins médiatisé que le football, la discipline a su néanmoins se construire de façon à devenir aujourd’hui un acteur incontournable de tout projet sportif pour la métropole.
Une discipline qui contribue à l’attractivité de la région Ile de France
La ville possède quatre clubs professionnels : le Stade Français de Paris, le Racing 92, Massy, et Suresnes. Ainsi que deux stades, d’une capacité de 20 000 et 30 000 places. Ces clubs occupent des places fondamentales dans le sport francilien. Une côte de popularité se dessine pour chacun d’eux. Tout en haut de la hiérarchie trône le Stade Français avec 32% des voix, juste devant le Racing 92 (28%). Essentiellement plébiscité par les moins de 25 ans, le PSG n’occupe, quant à lui, que la dernière place du podium avec 22% des voix. Ce renouveau a notamment été rendu possible par la performance des équipes à la fin des années 90. Ces liens qui ont été noués perdurent, et permettent de résister aux éventuels aléas sportifs.
Pourtant, le Racing 92 et le Stade Français évoluent le plus souvent devant des gradins clairsemés. Si le Racing 92 fait mieux avec plus de 14 000 spectateurs durant le Top 14, son taux de remplissage de 47 % témoigne des difficultés à remplir Paris-La Défense Arena. Les résultats sportifs jouent incontestablement un rôle en matière d’affluence. Contrairement au football, les performances de l’équipe de France contribue grandement à attirer le public vers les matchs de clubs, du fait de joueurs vedettes ainsi que d’une communication positive autour du sport (en dehors des accidents). Au-delà de la dimension sportive et de quelques joueurs de premier plan, le rugby doit, particulièrement en ile de France, faire face à une concurrence plus large liée à la densité de l’offre touristique (sports, musés, cinéma, concerts, attractions). Il faut se positionner sur le marché des sorties au sens large, en offrant le meilleur accès possible et une offre globale en matière de divertissement. Une identité reste de ce fait à construire durablement, car si « Stade de France rime avec France-Brésil », les stades Jean Bouin ou La Défense Arena n’ont pas encore d’identification marquée pour le grand public. Il faut faire mieux connaître et apprécier de tels lieux afin que le grand public y accole une image conviviale, en accentuant la communication encore aujourd’hui insuffisante. La perspective de diversifier les offres du lieu doivent aussi être prises en compte (soirée à thèmes, boîte de nuits géantes au stade, galas), pour faire venir des spectateurs réguliers et d’autres publics, avec l’idée du « là-bas il y a une vraie ambiance ». C’est toute une offre et une image de sportainment qui doit aujourd’hui tirer le modèle économique des clubs, dans une région où la consommation du spectacle sportif est en concurrence avec de nombreuses autres activités récréatives et culturelles. L’U-Arena constitue de ce fait un levier important pour le Racing 92.
Le rôle des clubs franciliens dans l’attractivité de la région parisienne se traduit à l’international, car le championnat français de rugby est le plus suivi de la planète. Ce rôle est aussi primordial dans le cadre des mobilités internes à la métropole. Aujourd’hui, le rugby est un sport national et non plus régional et les équipes parisiennes font partie des meilleures du monde : les fans de rugby ne seront donc pas déçus en arrivant à la capitale. Mais leur rôle reste aussi inaliénable dans les centres de formations, et l’attrait de jeunes espoirs à devenir des joueurs professionnels.
Un potentiel et des ressources à explorer
Avec 28.000 licenciés, dont 10% de femmes, et 175 clubs pour la saison 2018-2019, la région Île-de-France encourage fortement la pratique sur son territoire. Elle est celle qui apporte le plus gros contingent de joueurs tricolores, notamment en 2015 (plus alors que l’Aquitaine ou les Pyrénées, fournisseurs historiques). Un chiffre qui n’est pas surprenant, puisqu’une part importante de la population vit en Ile de France. Cela démontre la diffusion du rugby, y compris dans des territoires urbains où l’on voyait davantage le football auparavant.
Par ailleurs, de petites structures émergent dans des territoires plus populaires. Le célèbre joueur tricolore français Rabah Slimani a fait ses classes grâce à une école primaire du Val d’Oise, un partenariat qu’il reste à entretenir et à étaler sur les départements (jeux mixtes, entrainements, tournois inter écoles). Puis le rugbyman a bénéficié en 2012 d’un programme pour les zones urbaines sensibles, luttant notamment contre l’image d’un « sport de bourges comme le golfe ». Ils étaient à l’époque seulement 0,2% de licenciés à venir de ces quartiers contre 6,1% pour le football.
La métropole et la Fédération ont également signé un partenariat pour la promotion et le développement du rugby en Île-de-France en février 2019. Ils agissent ainsi pour un déploiement cohérent et concerté d’équipements sur le territoire. En 2018, le rugby francilien a bénéficié d’aides régionales de plus de 1 million d’euros pour se développer et s’étendre (pratique sportive, formation, emplois, infrastructures, rénovations). Ce soutien a permis de financer des Clubs Excellence franciliens (tels que le Rugby Club Domontois ou le Rugby Club de Versailles), d’accompagner le développement du futur Centre de la Fédération et de la Région Ile-de-France d’Innovation des Rugbys, qui pourrait s’implanter au Stade Raoul Montbrand à Pantin.
Des leviers pour le futur Rugby d’Ile de France
Si la France est devenue un pays du rugby les stades restent en quête d’identité, même d’un « Stade de France de Rugby » unissant tous les joueurs dans un même espace. Le projet d’un Grand Stade de Rugby avait été lancé en 2010, soutenu par la CCI Paris-Île-de-France, et perçu comme un « enjeu d’attractivité internationale et de développement économique ». Il aurait été construit en Essonne, et aurait permis au rugby de ne plus être tributaire du Stade de France ou d’autres espaces. A l’image du stade Twickenham, considéré comme un temple du rugby en Angleterre, qui a fait de Londres une capitale du rugby et cela participe à son attractivité et sa force de concurrence. Ce projet avorté, pourrait cependant être repensé notamment dans la perspective de la Coupe du Monde 2023. La pratique des jeunes reste elle aussi à favoriser, particulièrement dans les cours d’EPS des écoliers et collégiens, et en développant les partenariats avec les clubs, les scolaires, mais aussi les régions et les collectivités. De nombreuses nouvelles liaisons sont à imaginer encore pour inculquer la passion du ballon ovale, comme celle qui existe pour le ballon rond.
Le Grand Paris peut donc compter sur le rugby et ses pratiquants, qu’ils soient amateurs ou professionnels dans le rayonnement de son territoire. Fort d’un solide ancrage au sein de la population francilienne, la discipline ne demande qu’à s’étendre comme le football afin de devenir un facteur d’attractivité à l’échelle mondiale, s’appuyant sur ces deux grands clubs professionnels d’envergure.